« Matières à l’œuvre »

« Présentée par l’Institut National des Métiers d’Art (INMA), en partenariat avec le Mobilier national et avec le soutien de la Fondation Bettencourt Schueller, Grand mécène national, « Matières à l’œuvre », exposition nationale des Journées Européennes des Métiers d’Art, s’inscrit dans une programmation de milliers d’événements et de rencontres partout en France, dans des ateliers d’art, des centres de formation, des sites culturels et patrimoniaux. Les créations que nous vous présentons sont issues de savoir-faire d’exception, emblématiques de nos métiers d’art et du patrimoine vivant, et de nos matières. Transmission, recherche, créativité et éco-responsabilité sont les maîtres mots de ce parcours chargé d’émotions qui offre l’occasion de découvrir ou de redécouvrir l’importance de l’engagement des artisans d’art, des créateurs, de nos Maîtres d’art et leurs Élèves dont la reconnaissance, unique au monde, a dépassé le quart de siècle. C’est avec une grande joie que nous vous accueillerons dans la Galerie des Gobelins du Mobilier national pour vous faire découvrir à travers les matières et les matériaux ressources, recyclés, hybridés, augmentés, responsables, un florilège de créations imaginées et réalisées par les professionnels des métiers d’art et du patrimoine vivant. » (source INMA)

« Un bout d’humanité précieuse, un fil fragile tendu au travers des temps »

Journaliste, DJ, cheffe d’entreprise, photographe amateure, infatigable chineuse… Isabelle Fringuet est dure à classer. C’est justement ce que l’on aime, à la French Craft, et sans surprise cette nîmoise de cœur cultive son jardin artisanal en soutenant des savoir-faire aussi beaux que bons. Rencontre avec une craftangel qui tente avec beaucoup d’humilité de soutenir des familles d’artisans avec son site LUCE Shop.

FCG. Votre parcours est riche d’aventures, et plutôt éloigné du Craft a priori… comment est venue la rencontre avec l’artisanat ?

I.F. Ouuuh ! ça date… Il faut remonter à mon enfance en Algérie et des pérégrinations dans le pays. Je me souviens de poteries « domestiques » soulignées de motifs berbères, ceux des tatouages arborés par les femmes sur leurs visages et sur leurs mains. Je me souviens de religieuses dans un couvent sis au fin fond de la Kabylie qui commercialisaient les travaux de vannerie des femmes du village. Mon intérêt, au sens de l’attention que j’y ai porté, s’est très certainement développé à partir de là. Je n’ai jamais visité un pays, et j’ai eu la chance d’en visiter pas mal, sans chercher systématiquement les produits de l’artisanat local…

FCG. Quel type d’artisanat recherchez-vous principalement ?

I.F. Tout m’intéresse. Poteries, tissage, vanneries… Mon intérêt se porte justement sur leurs aspects utilitaires et essentiels. Sur leur caractère pérenne, voire éternel. Ils représentent selon moi un écho du passé toujours présent, un bout d’humanité précieuse, un fil fragile tendu au travers des temps. Ils incarnent aussi et avant tout les artisans qui les ont fabriqués, modelés avec patience, savoir-faire et une maîtrise qui force le respect.

FCG. Nous sommes loin du fonctionnel… c’est donc purement symbolique ?

I.F. Oui et non. Pour moi, c’est imbriqué. Ces objets sont utilisés dans la vie quotidienne pour cuisiner, servir les plats, cuire la semoule à la vapeur ou bien la viande sous des cendres ardentes ; pour couvrir des sols en terre battue, pour recouvrir un enfant, pour amuser les petits ou encore honorer des ancêtres ou des divinités. Ils sont en plus aujourd’hui détournés de ces premiers usages pour devenir une source de revenus essentiels à la survie de familles entières… pour notre plus grand plaisir, pour ma plus grande émotion. J’ai pas mal de ces objets chez moi, disposés un peu partout, ils m’arrachent un sourire chaque fois que je les croise. Inutile de préciser que j’y trouve ce que m’apporte aucun produit « autre », si ce n’est dans les tableaux que je glane ici et là… Souvent à l’occasion de voyages également. Art-artisanat, j’ai décidément du mal à faire la différence.

FCG. Peut-être parce que c’est la même chose à vos yeux ?

 I.F. Je viens d’aller vérifier la définition de l’un et de l’autre… Concernant l’art, il s’agirait « d’œuvres humaines destinées à toucher les sens et les émotions du public », concernant l’artisanat, cela concernerait « la production ou transformation de produits grâce à un savoir-faire hors contexte industriel de masse, et en général par un ou un.e artisan.e qui en assurerait la production et la commercialisation ». Bref, comme dirait l’autre, la réponse et dans la question ! Des objets d’artisanat, même produits en série, provoquent de l’émotion et, toujours selon moi, la différence entre les deux est le caractère unique de l’un et celui parfois multiple de l’autre…

FCG. Serait-ce aussi art de vivre ? Ou une culture ? Une philosophie ?

I.F. Vous pouvez répéter la question ?! Que dire, que dire… Des arts de vivre, des cultures, et des savoirs–faire intemporels qui survivent envers et contre tout… Oui, une certaine philosophie. Ce qui me vient le plus immédiatement à l’esprit en tout cas, c’est la joie. Leur belle joie, leur grande humilité.  Et leur véritable bonheur à les fabriquer, à les fabriquer « bien », à vanter leurs qualités, leurs finitions. Nous en revenons à la philosophie là non ? Une certaine philosophie de la vie, simple et joyeuse, en dépit de nombreuses difficultés…

FCG. Car ces savoir-faire sont menacés de disparaitre ?

I.F. Je suis suffisamment âgée aujourd’hui pour constater l’évolution des choses… Ce que l’on dénomme la mondialisation est un réel danger pour la survie de ces artisans. Les modèles dits traditionnels de vie qu’ils véhiculent tendent à s’effacer au profit d’autres métiers, d’autres activités plus faciles, parfois plus lucratives ou tout simplement plus respectées, malheureusement. Mais encore aujourd’hui dans une île comme Bali, c’est en apprenant à coudre et à broder des produits d’artisanat –des sacs, des poupées – que les mamans de Balimums épargnent à leurs enfants la mendicité dans les rues…

FCG. Est-ce le point central de votre engagement ? 

I.F. Oui. Ou tout simplement parce que j’admire leur savoir-faire, parce que cette admiration me motive à faire savoir leur savoir-faire… Parce que je les ai rencontrés et que nous sommes devenus amis. Leur disparition serait un drame pour moi, mais gardons à l’esprit que la chute de l’un entraine les autres. Le point commun entre tous ces artisanats est la façon dont ils sont fabriqués : à la « mano », et à l’aide d’outils que l’on peut considérer comme rudimentaires. Abdulileh, le « Maître des Babouches », partenaire de LUCE, travaille accroupi sur son minuscule tabouret de bois avec des outils façonnés juste à côté par les menuisiers et les ferronniers du souk. C’est un cercle vertueux… qu’il faut absolument préserver !

FCG. Que diriez-vous à quelqu’un qui voudrait en faire son métier ?

I.F. Je dirai « fonce ! » et surtout « ne te retourne pas ». Car il y a dans ces métiers une forme indéniable de création, de liberté, d’autonomie. Et tant d’occasion de belles rencontres ! Mais c’est un réel choix de vie. Une vie qui peut sembler plus hasardeuse, plus compliquée, mais une vraie vie. Là, je pense à mon amie Anne-Céline, artiste-artisane aux multiples talents, revenue s’installer dans sa Baie de Somme natale et qui – même si cela lui rapporte moins – a retrouvé tout le sens de sa création dans un environnement qui lui est cher.

«A piece of precious humanity, a fragile thread stretched through time»

Journalist, DJ, business manager, amateur photographer, tireless hunter… Isabelle Fringuet is hard to classify. This is exactly what we love, at the French Craft, and unsurprisingly this « nimoise » of heart cultivates her artisanal garden by supporting skills that are as beautiful as they are amazing. Meeting with a craft-angel who tries with great humility to support the families of craftsmen with her LUCE Shop site.

FCG. Your career is rich in adventures, and a priori rather far from Craft … how did you meet craftsmanship?

I.F. Ouuuh! It’s been a long time ago… We have to go back to my childhood in Algeria and peregrinations in the country. I remember “domestic” pottery underlined with Berber patterns, inspired by tattoos women wear on their faces and on their hands. I remember theses nuns in a convent located in the depths of Kabylia who marketed the basketry work of the women of the village. My interest, in the sense of the attention I paid to it, most certainly developed from there. I have never visited a country, and I have had the chance to visit quite a few, without systematically looking for local handicrafts …

FCG. What type of crafts are you mainly looking for?

I.F. Everything interests me. Pottery, weaving, basketwork , broidery… My interest is precisely in their utilitarian and essential aspects. On their perennial, even eternal character. In my opinion, they represent an echo of the ever-present past, a precious piece of humanity, a fragile thread stretched through time. They also and above all embody the craftsmen and women who make them, modeled with patience, a know-how and a mastery that inspires respect respect.

FCG. We are far from the functional … so is it purely symbolic?

I.F. Yes and no. For me, it’s intertwined. These objects are used in everyday life for cooking, serving dishes, steaming semolina or meat under burning ashes; to cover dirt floors, to dress a child, to amuse the little ones or to honor ancestors or deities.
They are also now diverted from these early uses to become a source of income essential to the survival of entire families … for our greatest pleasure, for my greatest emotion. I have quite a few of these objects in my house, scattered all over the place, they make me smile every time I see them. Needless to say, I find there what no « other » product gives me, except in the paintings that I glean here and there … Often on trips as well. Art-craftsmanship, I definitely find it hard to tell the difference.

FCG. Maybe because it’s the same to you?

I.F. I just went to check the definition of one and the other… Concerning art, it would be « human works intended to touch the senses and emotions of the public », concerning craftsmanship, that would concern « the production or transformation of products thanks to know-how outside a mass industrial context, and in general by a craftsman who would ensure their production and marketing ».
In short, as we could say, the answer and in the question! Handicrafts, even mass-produced items, cause emotion and, always in my opinion, the difference between the two is the uniqueness of one and the sometimes multiple of the other …

FCG. Could it also be the art of living? Or a culture? A philosophy?

I.F. Can you repeat the question?! What to say, what to say… Arts of living, cultures, and timeless know-how that survive against all odds… Yes, a certain philosophy. What comes to mind most immediately, anyway, is joy. Their beautiful joy, their great humility. And their true happiness in making them, in making them “well”, in praising their qualities, their finishes. We come back to philosophy there, don’t we? A certain philosophy of life, simple and joyful, despite many difficulties …

FCG. Because this know-how is threatened with disappearing?

I.F. I am old enough today to see how things are going … What we call globalization is a real danger to the survival of these artisans. The so-called traditional models of life that they convey tend to fade away in favor of other professions, other easier activities, sometimes more lucrative or simply more respected, unfortunately. But even today in an island like Bali, it is by learning to sew and embroider handicrafts – bags, dolls – that the mothers of Balimums spare their children from begging in the streets …

FCG. Is this the central point of your commitment?

I.F. Yes. Or quite simply because I admire their know-how, because this admiration motivates me to share their know-how … Because I met them and we became friends. Their disappearance would be a tragedy for me, but let’s keep in mind that the fall of one brings about the others. What all these crafts have in common is the way they are made: « a la mano », and using tools that can be considered rudimentary.
Abdulileh, the “Master of Babouches*”, partner of LUCE, works squatting on his tiny wooden stool with tools fashioned next to it by the carpenters and ironworkers of the souk. It is a virtuous circle … which must absolutely be preserved!

*slippers-mules

FCG. What would you say to someone who wants to make it their job?

I.F. I will say “go for it! « And above all » do not look back « . Because there is in these professions an undeniable form of creation, freedom and autonomy. And so many opportunities for great encounters! But it’s a real life choice. A life that may seem more hazardous, more complicated, but a real life. There, I think of my friend Anne-Céline, artist-craftswoman with many talents, returned to settle in her native Baie de Somme and who – even if it brings her less – has rediscovered all the meaning of her creation in an environment that is dear to her.

luce-shop.com

Les voyages immobiles de Sinople

Une des révélations de 2020, malgré les fermetures et les annulations d’événements, était sans conteste la proposition de Sinople, curateur et éditeur d’œuvres et objets d’art aux frontières de l’art, du design et du craft. Second volet d’un opus dédié à la nature, “Paysage intérieur” nous a transporté dans un univers intimiste et sensible, dont la poésie émerge autant de la maîtrise technique que de la beauté formelle. Retour sur quelques pièces emblématiques mêlant parfaitement savoir-faire, innovation et inspiration.


Pour le dessin et la conception de PROTOTYPE, un mot allait définir la ligne directrice et artistique, la réflexion d’Hugo Haas et Arnaud Mainardi : la forêt. Elle est le lieu de création du feuillardier, artisan aux techniques vernaculaires qui crée mobilier et objets à partir de méthodes d’assemblage ou de cintrage de jeunes branches de châtaignier. Lieu fragile de ressources et panorama entre terre et ciel, elle a également inspiré les lignes de cette table de travail qui se singularise par sa sobriété et rusticité contemporaine associant matériau premier et matériau industriel : châtaignier et acier. Tel un détail de la voûte céleste portée par les branchages, PROTOTYPE se présente comme un morceau de forêt.


Designer textile, Marion Chopineau conçoit des structures textiles contemporaines qui naissent le plus souvent de l’altération, de l’hybridation et du détournement de techniques artisanales. Elle explore le vivant et le textile dans une approche artistique plus sculpturale notamment illustrée par ses peaux insculpées véritables totems, tapisseries ou installations. Inspirés par la cartographie, les vues aériennes et les mouvements d’éléments naturels — l’eau suivant le lit de la rivière, le vent dans les hautes herbes — les mouvements organiques insculpés par l’artiste évoquent les traces d’anciens rituels, les signes et symboles pariétaux gravés dans la roche. Ils font écho aux notions de migration et de nomadisme, de flux à travers un territoire.


Pour amener à regarder et à s’étonner des manifestations du vivant, Léa Barbazanges réalise des assemblages avec des matériaux naturels et en met en exergue leur spécificité et leur beauté. Nervures, ramifications, transparences, brillances, reflets, sont le résultat d’un geste patient, méticuleux et rationnel. Poétique feuille d’aluminium modelée avec la complicité d’Isaak Rensing (tôlier formeur spécialiste de la restauration de véhicules de collection), « Filicineae » renouvelle l’exercice d’une empreinte végétale laissée à la surface du métal que l’artiste et l’artisan avaient initié avec Magnolia macrophylla — les masques. Tel un fossile contemporain, avec une extrême précision, l’œuvre laisse deviner chaque élément du graphisme naturel de la fougère commune qui se perd et se révèle au grès des reflets qui dansent sur le métal.


Lorsque Martine Rey rencontre la laque végétale « Urushi » au Japon, l’artiste fait face à un matériau dont la technique d’application croise son propre cheminement. Art prestigieux, elle est cependant un art d’ornement toujours lié à « l’habillage » d’objets. Tout en apprenant les gestes constitutifs de cette pratique séculaire, l’artiste libère un projet dans lequel la laque vient désormais mettre à nu l’objet anonyme, abandonné, délaissé. Elle détourne l’attention vers son histoire pour en décrire la profondeur insoupçonnée. Surface et reflet, la laque quitte ses atours protecteurs et décoratifs pour devenir une matière précieuse à part entière, la plume du temps écoulé sur les « choses ordinaires » magnifiées en reliques, en talismans.


Atelier Alba, fondé par Celia Suzanne & Erwann Larbre, est un atelier spécialisé dans le développement et la création de décors marquetés d’exception. Mettant en jeux leur passion commune pour les techniques ancestrales de la marqueterie et une démarche de recherche et développement, l’ambition de ses fondateurs est de déstabiliser le regard en proposant une approche inédite et contemporaine de leurs savoir-faire et de la matière. Sa curiosité pour les différents savoir-faire l’amène à faire se croiser des techniques et des matières fondamentalement opposées pour réconcilier traditions et innovation. La série de paravents développée avec Sinople s’inspire ainsi de l’objet rituel japonais, de sa fonction symbolique et ornementale souvent associée à des représentations de la Nature, et de la matière dont il se pare. Replié, l’artefact ne laisse voir que les veinages de son placage rare et précieux. Ouvert, par soustraction de papier mûrier marqueté de parchemin, l’écran révèle les spécificités du bois ; tantôt les cernes de l’arbre dont il provient, tantôt les élégants et surprenants motifs de la loupe. Par un habile jeux de composition, c’est un paysage onirique qui s’offre à voir et à discrétion.


Pour découvrir les autres créateurs et créations présentées, téléchargez le catalogue.

Merci à Julien Strypsteen et Éric-Sébastien Faure-Lagorce, fondateurs de Sinople, pour leur aimable participation et autorisation de reproduction de leur catalogue (tous droits réservés).


The motionless journeys of Sinople

One of the revelations of 2020, despite the closures and cancellations of events, was undoubtedly the proposal of Sinople, curator and publisher of works and objects of art at the frontiers of art, design and craft.
The second part of an opus dedicated to nature, “Interior Landscape” transported us to an intimate and sensitive universe, whose poetry emerges as much from technical mastery as from formal beauty. Here’s a look back at some emblematic pieces that perfectly combine know-how, innovation and inspiration.


For the drawing and conception of PROTOTYPE, one word would define the guiding and artistic line, the reflection of Hugo Haas and Arnaud Mainardi: the forest. It is the cooper’s creative place, a craftsman using vernacular techniques to creates furniture and objects using methods of assembling or bending young chestnut branches. A fragile place of resources and a panorama between earth and sky, which also inspired the lines of this work table which stands out for its sobriety and contemporary rusticity combining raw material and industrial material: chestnut and steel. Like a detail of the celestial vault carried by the branches, PROTOTYPE appears like a piece of forest.


Textile designer, Marion Chopineau designs contemporary textile structures that are most often born from the alteration, hybridization and diversion of artisanal techniques. She explores living things and textiles in a more sculptural artistic approach, particularly illustrated by her sculpted skins, real totems, tapestries or installations. Inspired by cartography, aerial views and the movements of natural elements – the water following the bed of the river, the wind in the tall grass – the organic movements inspired by the artist evoke traces of ancient rituals, parietal signs and symbols carved into the rock. They echo the notions of migration and nomadism, of flows through a territory.


To make people look and be amazed at the manifestations of the living, Léa Barbazanges creates assemblies with natural materials and highlights their specificity and beauty. Ribs, ramifications, transparencies, shine, reflections, are the result of a patient, meticulous and rational gesture. Poetic aluminum foil modeled with the help of Isaak Rensing (sheet metal worker specialist in the restoration of vintage vehicles), “Filicineae” renews the exercise of a plant imprint left on the surface of the metal that the artist and the artisan had initiated with Magnolia macrophylla – the masks. Like a contemporary fossil, with extreme precision, the work hints at every element of the natural graphics of the common fern which is lost and revealed in the sandstone reflections dancing on the metal.


When Martine Rey meets the « Urushi » plant lacquer in Japan, the artist is faced with a material whose application technique crosses her own path. A prestigious art, however ornamental, always linked to the « dressing » of objects. While learning the constitutive gestures of this secular practice, the artist releases a project in which lacquer now comes to lay bare the anonymous, abandoned, neglected object. She diverts attention to her story to describe its unsuspected depth. Surface and reflection, the lacquer leaves its protective and decorative garb to become a precious material in its own right, the pen of time elapsed on « ordinary things » magnified in relics, in talismans.


Atelier Alba, founded by Celia Suzanne & Erwann Larbre, is a workshop specializing in the development and creation of exceptional inlaid decorations. Bringing into play their common passion for ancestral marquetry techniques and a research and development approach, the ambition of its founders is to destabilize the gaze by offering a new and contemporary approach to their know-how and the material. Their curiosity for different skills leads them to combine techniques and fundamentally opposed materials to reconcile traditions and innovation. The series of screens developed with Sinople is thus inspired by the Japanese ritual object, its symbolic and ornamental function often associated with representations of Nature, and the material with which it is adorned. Folded up, the artifact only shows the veins of its rare and precious veneer. Open by subtracting mulberry paper inlaid with parchment, the screen reveals the specificities of wood; sometimes the rings of the tree from which it comes, sometimes the elegant and surprising patterns of the magnifying glass. Through a skillful play of composition, it is a dreamlike landscape that offers itself to be seen and at discretion.


To discover the other creators and creations presented, download the catalogue.

Thanks to Julien Strypsteen and Éric-Sébastien Faure-Lagorce, founders of Sinople, for their kind participation and permission to reproduce their catalog (all rights reserved).

Ces femmes qui ont choisi la créativité pour être indépendantes

Par Claudia Cesiro, Directrice Marketing de Mooza

A l’occasion de la journée de la femme, les thèmes de la figure féminine se multiplient : le rôle (ou plutôt les rôles) que la société lui attribue (mère, épouse…), sa carrière, mais aussi comment démarrer sa propre entreprise. Dans ce scénario, les artisanes, en tant que partie intégrante du « made in Italy », sont quelque peu laissées de côté, encore victimes de la sous-estimation de leur travail. Mooza, la place de marché qui accueille les artisans du style de vie made in Italy, est un lieu privilégié pour enquêter – compte tenu de la variété des profils et des histoires qui l’anime – en allant un peu plus loin pour comprendre leurs difficultés, comment elles affrontent les défis que leur passion entraine, et en cherchant une nouvelle clé de lecture qui pourrait aussi inspirer celles qui doutent de l’opportunité d’emprunter un tel chemin. Nous avons ainsi rassemblé des parcours de toute l’Italie et de tous les domaines : mode, accessoires, bijoux et design… compilant d’un côté les clichés et de l’autre des récits de détermination, d’engagement et de volonté.

Quels sont les clichés ou critiques récurrentes auxquels les artisanes font face ? Pour beaucoup, l’un des problèmes est très souvent de ne pas être prise au sérieux et que leur centre d’intérêt est confondu avec un passe-temps ou, pire, un « job du dimanche ». La dévalorisation de leur activité créatrice, parfois par des amis ou parents, est l’un des écueils les plus fréquents qui s’aggrave avec le fait d’avoir à lutter contre le lieu commun qui veut qu’un homme soit meilleur pour un certain type d’artisanat.

C’est ce qui est arrivé à Laura de Bottega Celeste-Made in Volcano Etna, une artisane spécialisée dans la métallurgie. Lorsqu’elle a demandé un financement pour son entreprise, elle s’est entendu répondre qu’on s’attendait à parler à un homme, car un orfèvre est généralement un homme, tandis que les bijoux sont achetés pour les femmes. Laura a dû se battre pour son financement, non seulement en montrant que même une femme peut travailler les métaux (et le feu) mais surmonter également l’obstacle de ne pas venir d’une famille d’orfèvres, étant tombée amoureuse de cette ancienne technique au point s’en faire son métier. Aujourd’hui, Laura perpétue une culture de fabrication traditionnelle, avec des temps de traitement précis, loin de la production de masse. Ce sont cette philosophie, concentrée sur la continuité des savoir-faire, et son opiniâtreté qui lui ont finalement permis d’obtenir un prêt.

Les problèmes deviennent encore plus intéressants – ou plutôt irritants – quand c’est une maman qui tente de démarrer sa société. Des phrases telles que « Bah, tu es à la maison de toute façon », comme si le fruit de son expérience, développée au fil des ans et peut-être de son enfance, n’était guère qu’une façon de s’occuper. Beaucoup de nos artisanes et mères nous ont pourtant raconté comment, à certains moments de leur vie, se dédier à leur vocation et dégager du temps pour les moments de création pure était le moyen de ne pas se sentir écrasées par les responsabilités familiales et professionnelles, et de retrouver un équilibre.

C’est l’histoire de Michela de Mama’s qui, avant de se consacrer pleinement à ses créations vestimentaires, avait un job « sûr » d’employée, deux enfants et un mari. Au moment où elle commence à sentir qu’elle satisfait tout le monde sauf elle-même, elle trouve, mise de côté, la machine à coudre de sa mère. Un monde s’allume fait de souvenirs. Ayant grandi au milieu des pelotes, fils et aiguilles, elle se souvient soudainement de toutes les choses qui lui avaient été enseignées et qu’elle sait faire. Elle commence alors à se dédier à la couture de plus en plus fréquemment, jusqu’à prendre la décision courageuse de quitter son emploi. La phrase de Walt Disney devient sa devise « Si tu peux en rêver, tu peux le faire » et elle se lance à plein temps. Des commerçants acceptent de mettre quelques-unes de ses pièces dans leur vitrine, et lui donnent confiance pour continuer, malgré les difficultés.

Monica di LeGongole offre un témoignage similaire, dans laquelle sa passion pour les accessoires et les bijoux devient sa principale activité. Mère de trois enfants qui nécessitaient un suivi particulier à la maison ainsi qu’à l’école, elle se décrit ainsi : « Perdue à la croisée de chemins, dans une forêt noire et épaisse… J’ai toujours fait ce que je n’étais pas, et puis la vie m’a mise à un endroit où je pouvais le mieux me rencontrer. » Sa démarche créative part de la recherche de différents matériaux, même imparfaits, car c’est dans l’imperfection qu’on est unique. Elle conçoit des modèles d’accessoires et surtout des sacs avec un design original fait de broderie à la main et, lentement, avec l’aide d’amis qui remarquent et sollicitent son travail, commence à les proposer. Pour celles qui rencontrent une situation similaire, Monica leur conseille ceci : « On survie à tout. C’est bien d’écouter les conseils des autres, mais à un moment, vous devez suivre votre instinct. »

Un aspect commun à de nombreux parcours est celui de l’importance du soutien entre femmes artisanes. Nous ne parlons pas ici de la solidarité féminine en général, mais bien de l’aide concrète de celles qui vous vous donnent un vrai coup de pouce quand vous démarrez. Xenia de Xene Handmade, par exemple, a commencé son projet avec une partenaire quand peu de gens croyait encore à leur talent pour réaliser des bougies conçues de véritables objets design, et croyait moins encore à leur capacité d’en faire un gagne-pain. Xenia raconte que, une fois avoir investi elles-mêmes pour commencer à produire, toutes les opportunités notables afin de faire évoluer leur marque sont venues de leur collaboration avec d’autres femmes : de celles qui ont reconnu et exposé leur œuvres, ou de celles avec lesquelles elles ont noué des partenariats, à l’instar de l’illustratrice qui dessine leur nouvelle ligne de packaging en édition limitée.

Ces femmes, dans ce cas comme dans les autres, ne manquent pas de volonté. Même lorsqu’elles évoluent dans un environnement plus habitué à voir des créatrices et cheffes d’entreprise, les écueils sont bien là, et ils sont énormes. Caterina de Veraroad, une marque de vêtements féminins originaire de Toscane, nous dit ainsi que « un petit entrepreneur doit toujours porter des pantalons », faisant référence aux centaines d’obstacles que les artisans hommes et femmes affrontent, : devoir tout faire tout seul ou transférer dans le monde digital la qualité, l’effort et l’engagement que représente un produit fait-main. Une contrainte imposante qui leur demande de fabriquer des choses uniques, de les promouvoir en ligne et si possible de gérer leurs réseaux sociaux pour communiquer dès qu’ils le peuvent. Tina de T.I.N.A There Is No Alternative, qui conçoit des bijoux et des accessoires, va même plus loin en expliquant à quel point il est difficile de valoriser la créativité issue de l’artisanat surtout lorsque les matériaux utilisés sont communs et peu précieux tels que le textile, reléguant les bonnes idées dans la case « aucun mérite ».

Lalla de La casa di Lalla, qui s’occupe de récupérer du mobilier et des objets brocantés pour proposer de « vivre sa maison en harmonie », partage dans son blog les difficultés à improviser plusieurs identités professionnelles en même temps. Pour autant, « suivre le chemin de la créativité a été le meilleur choix de ma vie » nous dit-elle.

Nous concluons ce rapide voyage dans le monde de l’artisanat féminin en les remerciant pour l’énergie, l’enthousiasme et l’imagination qui les ont menées à transformer leur existence, faire des choix courageux et surtout créer pour les autres des produits incomparables. Nous avons été contactés par de nombreuses candidates lors de la rédaction de cet article. Nous n’avons pas pu parler de toutes comme nous l’aurions voulu, c’est pourquoi à Mooza nous avons décidé de dédier une partie de notre site à toutes ces histoires inspirantes que nous avons collecté.

Merci à toutes pour vos précieux témoignages, et particulièrement :

  • Laura – Bottega Celeste-Made in Volcano Etna
  • Tina – T.I.N.A there is no alternative
  • Caterina – Veraroad
  • Monica – Le gongole
  • Lalla – La casa di lalla
  • Michela – Mama’s
  • Raffaella – di Raffaella Scheghel
  • Rosaria – Bottega Creative
  • Sara – 3D Print © SAYU
  • Xenia – Xene Handmade

A journey into the stories of women who have chosen creativity
to be independent.

By Claudia Cesiro, Head of Marketing of Mooza

On women’s day, the themes on the female figure multiply: social issues about the role (or rather the roles) that society attributes to her (mother, wife, etc.), women and career, and also how to start an entrepreneurial activity on your own. In this scenario, artisan women, as an integral part of made in Italy, are somewhat left aside, still victims of underestimation of their work. Mooza, the marketplace that welcomes artisans of the made in Italy lifestyle is a privileged place from which to investigate, given the variety of profiles and stories that animate it, going a little deeper to understand what are the difficulties of artisan women, how they face the challenges that their own passion poses them, in search of a new key reading that can also be of inspiration for those who have doubts whether to undertake a path based on one’s creativity. We have thus collected stories of women from all over Italy and from all areas of craftsmanship: fashion, accessories, jewelry and design, collecting on one side clichés and for the other side stories of determination, commitment and will.

What are the clichés or recurring criticisms that many artisan women become subject to?
Very often for many one of the problems is not to be taken seriously and that their passion is mistaken for a hobby or, worse, to be the ones who do « sunday jobs ». The understimating of one’s creative activity, sometimes also by friends and relatives, is one of the most recurrent rocks that is also accompanied by the aggravating of having to fight against the common place that prefers in the collective imagination a man for a certain craft job.

This is what happened for example to Laura of Bottega Celeste-Made in Volcano Etna, a crafter-women specialized in metalworking who when she asked for funding for her business she was told that they would expect to talk to a man, because a goldsmith is generally a man, while jewelry are bought for women. Laura had to fight for her funding not only by showing that even a woman can work metals (and fire) but also overcome the obstacle of not even coming from a family of goldsmiths, since she had fallen in love with the ancient tradition of metalworking making it her main occupation. Today Laura is the bearer of an ancient culture of manufacturing that foresees precise processing times away from mass production, and her working philosophy is precisely focused on this sense of continuity of ancient knowledge, and it was this determination that finally allowed her to obtain funding.

The initial difficulties become even more interesting or we could say irritating when it is a mother who is trying to start a craft business. Phrases like « well so much you’re at home », as if the fruit of your own experience, developed over years and perhaps learned as child, was little more than a way to spend time. Some of our artisan women and mothers told us how at certain times in their lives, dedicating themselves to their craft passion and giving space to moments of creation as such, was the lever not only not to feel crushed by the responsibilities of the family and work but also to find themselves and give balance to their lives. This is the story of Michela of Mama’s, who before dedicating herself to full-time sartorial creations, was engaged in a « safe » job as an employee with two children and a husband. At a time when she felt she had satisfied everyone but herself, she finds, set aside, her mom’s sewing machine. A world lights up made of memories. She grew up in half to the balls, needles, wires, suddenly remembers all the things that had been taught to her and that she knows how to do. He began to devote himself to this activity more and more frequently, until he made the brave decision to quit his job. A phrase from Walt Disney becomes his motto « If you can dream of it you can do it » and so he becomes a full-time craftswoman. Some shopkeepers put some of her creations in their stores and this gives her confidence to continue, despite the difficulties. Monica di LeGongole also has a similar history, in which the passion for accessories and bijoux has become her main activity. Mother of three children, who particularly needed to be followed at school and at home, describes herself thus « In the middle of the path of our life, I found myself for a dark forest, that the straight way was lost… I’ve always done what I wasn’t, then life put me in a position to be the one where I can best recognize myself. » Her creative activity starts from the search for different materials, even imperfect, because it is in imperfection that uniqueness is found. She designs models of accessories and above all bags with a unique design with handmade embroidery and slowly also with the help of friends who noticed her creations and asked her, she began to propose them. Among the tips for those who are in a difficult moment Monica tells us « You survive everything. It’s okay to listen to other people’s advice, but at some point you have to follow your instinct. »
One aspect that we have found in many stories is also the importance for craft women of the support of other women. We are not talking about women’s solidarity in general, but about the concrete help of those who give you a chance when starting a business. Xene Handmade for example started her own craft business with her partner, when not many believed in their talent for creating handcrafted candles that were real design objects and even less that they could make it their main work. Xenia tells us how, once the investments to start production were made on their own, all the opportunities to be noticed and develop the brand came through collaborations with other women: women who believed in their work by inserting their products on display and women with whom to create partnerships, such as the illustrator with whom they are making new limited edition packaging. The determination in this case, as in others we have heard, is not lacking. Even if our artisan is in an environment more accustomed to the female figure as a creative figure and entrepreneur together, the difficulties to be faced are huge. Caterina of Veraroad, a women’s clothing brand made in Tuscany, for example tells us « a small entrepreneur must always put on his pants », referring to the thousand difficulties that everyone, cafters women and men, have to face, such as having to do everything on their own and second to transfer the quality, work and dedication that is there in every handmade product from the real world to digital.
Crafters, women and men are now in great demand: to produce unique things, to promote their product online and preferably to follow social media as well, communicating whenever they can.
Tina of T.I.N.A There Is No Alternative who makes jewelry and accessories, goes even deeper into the problem telling us how many times the difficulty is to make the value of artisan creativity understood, especially when working common and not valuable materials, such as fabrics, as if having brilliant ideas was a common thing and should not be rewarded. Lalla of  La casa di Lalla, which deals with the recovery of furniture and brocant objects with the philosophy of « living the house in harmony », told us about the difficulties of improvising more professional figures together, so much so that in a blog she collected all her experiences to share them with others.

« Following creativity was the best thing in my life »

Lalla – La casa di Lalla

We conclude our journey among artisan women by thanking them for their infinite energy, passion and creativity that led them to transform their lives, to make courageous choices and above all to create unique things for others. For the composition of this article we have been contacted by many female artisans. We would have liked to have put all of them in this article, but it was not possible.
The material collected and the stories were many and interesting and we at Mooza decided to create a permanent section to tell more stories, to give inspirational content for others and to give space to the determination and creativity of artisan women.

Thank you to each of you for your valuable contribution. A special thanks goes to:

  • Laura – Bottega Celeste-Made in Volcano Etna
  • Tina – T.I.N.A there is no alternative
  • Caterina – Veraroad
  • Monica – Le gongole
  • Lalla – La casa di lalla
  • Michela – Mama’s
  • Raffaella – di Raffaella Scheghel
  • Rosaria – Bottega Creative
  • Sara – 3D Print © SAYU
  • Xenia – Xene Handmade

Studio Pli, l’artisanat comme ligne de vie

PLI est un studio bienveillant et éco-responsable qui perpétue la grande tradition des artisans plisseurs jusqu’alors réservée au monde de la Haute Couture. Elle n’est pratiquée aujourd’hui que par seulement 4 personnes en France. Différents types de matériaux sont ainsi plissés artisanalement dans cet atelier pour créer des objets auto-édités ou des projets sur mesure dans le domaine de l’architecture et du design. Sa fondatrice, Sarah Osseland, œuvre pour faire reconnaître ce savoir-faire mais aussi pour revaloriser l’artisanat d’art en général. Rencontre avec une craftangel aussi douce que déterminée.

FCG. Comment vous est venue la passion de l’origami ?

SH. J’ai découvert il y a 6 ans le métier d’artisan plisseur via un reportage sur les ateliers Lognon. On y voyait M. Lognon qui ennoblissait les tissus. La technique des métiers à plisser, la beauté du geste, la préservation de ce savoir-faire artisanal m’ont marquée. J’étais à une période de ma vie professionnelle où je me cherchais. Après avoir fait des études en architecture et un séjour à l’étranger, je cherchais comment m’approprier cet art et pratiquer l’architecture à ma façon. Par ailleurs, j’avais depuis toujours un attrait pour le patrimoine tant architectural qu’immatériel. J’ai voulu apprendre les techniques de plis pour les appliquer à l’architecture. Mon premier projet était la création des origanids, des architectures pliables autoportantes faites en Tyvek. J’utilisais la propriété portante du pli pour en faire des micro-architectures pliables. Des personnes m’ont demandé si je pouvais faire d’autres objets. Un univers s’est ouvert à moi. J’y ai vu toutes les possibilités qu’offrait le pli tant en architecture qu’en design. Le côté épuré et utile de l’objet esthétique me plaisait.

FCG. Qu’y trouvez-vous de spécial que vous ne trouvez pas ailleurs ?

SH. J’aime le fait de pouvoir créer un volume à partir d’une feuille. La mise en forme de la matière de façon épurée me plaît. Cela s’applique à n’importe quel artisanat mais c’est ce qui me fascine dans l’art du pli.

FCG. Est-ce plutôt un art ou un artisanat selon vous ?

SH. Pour moi l’art s’observe, s’admire, et l’artisanat se manipule. En fonction des projets, le pli peut être un objet d’art comme l’art mural, pour d’autres il peut être manipulé comme des paravents.

FCG. En tant que française, l’appropriation de cette technique japonaise modifie-t-il la démarche ? Est-ce que vous l’avez « adaptée » ?

SH. Non. Les techniques que les artisans plisseurs utilisent sont ce que l’on appelle de la tesselation. C’est un motif répété inspiré de la technique japonaise. Je n’adapte pas le pli mais plutôt son utilité. A titre d’exemple, je me suis inspirée de modèles d’enveloppes japonaises pour en faire des modules plats que j’utilise pour l’art mural.

FCG. Comment vous est venue l’envie de valoriser les artisans ?

SH. En découvrant le métier d’artisan plisseur, j’ai mis un pied dans l’univers de l’artisanat que je ne connaissais pas. Je me suis rendue compte qu’aujourd’hui l’artisanat était une vocation pratiquée par des personnes engagées qui cherchaient une manière de perpétuer un savoir-faire en y apportant une touche d’innovation. Jusqu’il y a encore peu de temps, l’artisanat n’était à mon avis pas aussi mis en avant. J’ai l’impression de faire partie de cette génération de personnes qui veut pratiquer un métier plus authentique en contact avec la matière, ses clients, ses fournisseurs et ainsi contribuer à faire vivre un écosystème artisanal local. Valoriser, les artisans, c’est à la fois valoriser un savoir-faire, un mode de vie mais aussi un territoire. Mon séjour à l’étranger m’a sûrement fait prendre conscience que, contrairement à ce que l’on pense, l’herbe n’est pas plus verte ailleurs. La France regorge de talents, de savoir-faire qu’on doit préserver, qui fontt la richesse de notre pays.

FCG. Que diriez-vous à quelqu’un qui voudrait en faire son métier comme vous ?

SH. Je lui suggérerais de lire des livres sur le sujet pour connaître les techniques de bases du pli, d’expérimenter pour s’approprier la technique et avoir sa propre expression comme lorsque l’on apprend une langue. Connaitre les bases pour faire ses propres phrases, avoir son propre style d’écriture. D’expérimenter par lui-même car en France, rares sont les artisans spécialisés dans le pli qui ouvrent leurs ateliers et offrent la possibilité de transmettre leur savoir-faire. De se rapprocher d’organismes en lien avec l’artisanat pour réseauter, découvrir d’autres artisans qui font partie de cet univers, de cette façon de penser, et qui pourront donner de bons conseils.

Studio Pli, crafts as a life line

PLI is a benevolent and eco-responsible studio which perpetuates the great tradition of pleating artisans until then reserved for the world of Haute Couture. It is practiced today by only 4 people in France. Different types of materials are thus pleated by hand in this workshop to create self-published objects or tailor-made projects in the field of architecture and design. Its founder, Sarah Osseland, works to promote recognition of this know-how but also to enhance the value of craftsmanship in general. Meeting with a craftangel as sweet as determined.

FCG. How did you get your passion for origami?

SH. 6 years ago, I discovered the craft of artisan-pleater through a report on the Lognon workshops. We saw Mr. Lognon ennobling the fabrics. The technique of the pleating looms, the beauty of the gesture, the preservation of this artisanal know-how marked me. I was at a time in my professional life where I was looking for myself. After studying architecture and spending time abroad, I was looking for ways to appropriate this art and practice architecture in my own way. Furthermore, I have always had an attraction for both architectural and intangible heritage. I wanted to learn folding techniques to apply them to architecture. My first project was the creation of « origanids« , freestanding foldable architectures made in Tyvek. I used the bearing property of the fold to make foldable micro-architectures. People asked me if I could make other objects using the fold. So I developed other projects. From there, I went into the fold. A universe opened up to me. I saw all the possibilities offered by the fold in both architecture and design. I liked the clean and useful side of the aesthetic object.

FCG. What do you find special there that you can’t find elsewhere?

SH. I love the fact that I can create a volume from a sheet. The shaping of the material in a refined way pleases me. This applies to any craft, but that’s what fascinates me about the art of folding.

FCG. Is it more an art or a craft according to you?

SH. For me art is observed, admired, and craftsmanship is manipulated. Depending on the project, the fold can be seen as an art object like wall art, for others manipulated like screens.

FCG. As a French woman, does the appropriation of this Japanese technique change the approach? Did you « adapt » it?

SH. No. The techniques that pleating artisans use are called tessellation. It is a repeated pattern inspired by Japanese technique. I am not adapting the fold but rather its utility. As an example, I took inspiration from Japanese envelopes models to make flat modules that I use for wall art.

FCG. How did you come up with the desire to promote artisans?

SH. By discovering the craft of a pleating craftsman, I entered the world of craftsmanship that I did not know before. I realized that today craftsmanship was a vocation practiced by committed people who were looking for a way to perpetuate know-how by adding a touch of innovation. Until recently, craftsmanship was not so prominent in my opinion. I have the impression of being part of this generation of people who want to practice a more authentic profession in contact with the material, its customers, its suppliers and thus help bring a local artisanal ecosystem to life. Valuing craftsmen is both valuing know-how, a way of life but also a territory. My time abroad has surely made me realize that contrary to popular belief, the grass is not greener elsewhere. France is full of talents, of know-how that must be preserved, which makes up the wealth of our country.

FCG. What would you say to someone who wants to make it their job like you?

SH. I would suggest that he read books on the subject to learn the basic techniques of the fold, experiment to appropriate the technique and have his own expression as when learning a language. Know the basics of making your own sentences, having your own writing style. To experiment for yourself because in France, there are few craftsmen specializing in folds who open their workshops and offer the opportunity to pass on their know-how. To get closer to an organization related to the craft industry to network, to discover other craftsmen who are part of this universe, this way of thinking and who can give good advice.

studiopli.com

Paris Design Week 2020

On dit que c’est le plus grand espace vert privé de Saint-Germain-des-Prés. 
On raconte que l’arbre le plus vieux de Paris y demeure, sur un terrain resté vierge de toute construction, depuis toujours.
On découvre que Colette habita les lieux, que Racine y mourut non loin.
On murmure que des passages secrets existent encore pour relier les rues, et que les caves communiquent… Qu’un Temple de l’Amitié se niche secrètement « au milieu du petit parc sauvage ».
Cet endroit, c’est le Pré aux clercs, ou Bois Visconti. Aux XVIE et XVIIE s., ce clos servit de cadre à de nombreux duels, mais également de terrain de chasse. Une partie de ce clos fut achetée par la reine Margot, qui y aménagea un véritable parc.
Mais c’est surtout dans ce cadre enchanteur et inspirant que les créateurs Oscar Lucien Ono et Axel Huynh ont tout naturellement dévoilé hier soir leur dernière collection de luminaires, autour du thème
« Nature & Bauhaus ». Place aux images.

Le dessin sans réserve

Méconnue du grand public comme des spécialistes, la collection de dessins du musée des Arts décoratifs est pourtant l’une des plus riches du monde. Elle compte près de 200 000 œuvres, qui s’échelonnent du XVe au XXIe siècle et s’étendent jusqu’au lapon.
Son importance et ses contours sont le fruit de l’histoire singulière de cette institution créée en 1864 par des industriels, des fabricants, des créateurs et des collectionneurs généreux. Les esquisses de grands maîtres, comme Le Brun. Watteau. Fragonard et Degas, côtoient les dessins d’architectes et de décorateurs, tels Mallet-Stevens ou Chareau, et les productions d’ébénistes ou de maisons de joaillerie et de couture.
Des artistes attachés au musée lui ont offert une sélection de leurs œuvres, ponctuelle pour Rodin, large pour Dubuffet, voire la totalité de leur fonds graphique, pour Emilio Terry ou Jean Royère.

En savoir plus sur le site du MAD Paris

Alexandre Gabriel, aux sources des spiritueux

« Pour moi, les savoir-faire ancestraux, c’est une source d’inspiration. Ce n’est pas une mimique ! On ne les copie pas. C’est une dynamique car on les revisite. » D’emblée le ton est donné. Alexandre Gabriel est ouvert, comme une encyclopédie populaire, et partage sa passion avec plaisir et générosité. Celui qui a fondé en 1989 la Maison Ferrand est à la fois distillateur, maître de chai, master blender, entrepreneur, créateur et un infatigable poseur de questions.

C’est qu’Alexandre Gabriel a su insuffler à sa maison – une entreprise familiale – un esprit tout particulier qui la rend à part dans le monde des spiritueux français : chef d’orchestre, il connait parfaitement ses classiques, libre de s’affranchir de la technique pour les réinterpréter tout en restant fidèle aux origines. Cognac, Gin, Rhum, Eaux-de-vie… chaque liqueur est pour lui une « culture avec un prisme différent » issue des connaissances et des découvertes, des voyages et des conquêtes. De cette Histoire, il a su garder la dimension humaine et l’attachement aux sols qui prodiguent arômes et bouquets. Mais par-dessus tout, il apporte une contribution significative au patrimoine de ce qu’il nomme non sans malice – mais avec bon sens – « la gastronomie liquide ».

Tout d’abord par une réflexion depuis plusieurs années sur le vignoble, par des techniques culturales privilégiant l’expression identitaire de l’appellation et le respect de l’environnement. Désormais, un rang sur deux est enherbé, les sols sont travaillés mécaniquement, et la plantation de graminées permet aussi de décompacter les sols, de les aérer et donc de favoriser la vie microbienne. Autre avantage, ces graminées forment un paillage bienvenu qui sert aussi d’engrais naturel. Et si le promeneur s’étonne de voir des moutons entre les vignes, c’est qu’ils participent à l’entretien du domaine et constituent les plus efficaces des tondeuses !

Ensuite par l’amélioration constante des procédés autour de la distillation et du vieillissement en fût, avec notamment un travail fouillé sur les bois. De l’expérimentation à l’innovation, il n’y a qu’un pas, celle d’une recherche couronnée par le dépôt de brevet sur l’infusion progésive pour son Gin Citadelle, certifiant la rigueur dont Alexandre Gabriel sait faire preuve, autant que d’imagination (voir l’article sur le Gin Citadelle). Aussi, et sur cela il insiste : afin de perpétuer cette transmission des gestes, dont il est le dépositaire éphémère. L’idée d’une fondation pour assembler cette mémoire et préserver ces savoirs « qui sont plus grands que nous » s’ajoute à la longue liste de ses projets en cours.

Enfin, évidemment, sur les ingrédients, l’assemblage, la recette. Le goût. « Je suis un créateur d’émotions, grâce à des produits uniques. C’est avant tout une démarche gastronomique, par la mise en valeur d’un élément dominant, pour en révéler imperceptiblement la qualité gustative. Ainsi, pour le gin, la baie genièvre peut être sublimée par la cannelle ou la noix de muscade. » Ou par la coriandre, la cardamome, l’angélique, le cumin, l’amande, les graines de paradis, la réglisse, le cubèbe, la sarriette, l’anis étoilé, le cassia, l’iris, la violette, le fenouil, les zestes d’orange et de citron… la palette aromatique du gin Citadelle s’articule autour de 19 saveurs, soigneusement sélectionnées pour leur qualité exceptionnelle et leur potentiel combinatoire.

Élaborés avec des soins d’orfèvre, les spiritueux artisanaux haut-de gamme de la Maison Ferrand figurent aujourd’hui comme des modèles dans leurs catégories respectives, tous sont frappés du sceau de l’exigence avec cette capacité rare d’étonner, d’émouvoir et de donner du sens à la matière. N’est-ce-pas là la fonction première de la création ? C’est aussi très français ! « Nous les français, nous allons au bout des choses, nous transcendons l’état de l’art. On est des geeks, quelque part. Mais tout ce que l’on fait doit paraître facile. C’est ça, la virtuosité. Et c’est ensemble que nous sommes les meilleurs, en confrontant nos savoirs de façon transversale. Pas en restant dans notre coin. Les Américains disent “Knowledge is power”. Moi je dis “Knowledge is pleasure”. » So French Craft.


Alexandre Gabriel, at the source of spirits

“For me, ancestral know-how is a source of inspiration. It’s not a mimic! We don’t copy them. It’s a dynamic because we revisit them.” Right away the tone is set. Alexandre Gabriel is open, like a popular encyclopedia, and shares his passion with pleasure and generosity. The founder of Maison Ferrand in 1989 is a distiller, cellar master, master blender, entrepreneur, creator and a tireless questioner.

This is because Alexandre Gabriel knew how to infuse his house – a family business – with a very special spirit that makes it unique in the world of French spirits: conductor, he knows his classics perfectly, free to escape the technique to reinterpret them while remaining faithful to the origins. Cognac, Gin, Rum, Eaux-de-vie… each liquor is for him a “culture with a different prism” resulting from knowledge and discoveries, travels and conquests. Using our History, he knew how to keep the human dimension and the attachment to the soils that lavish aromas and bouquets. But above all, he makes a significant contribution to the heritage of what he calls not without malice – but with common sense – « liquid gastronomy ».

First of all by a reflection for several years on the vineyard, through cultural techniques favoring the identity expression of the appellation and respect for the environment. Now, every second row is planted with grass, the soils are mechanically worked, and the planting of grasses also helps to decompacte the soils, aerate them and thus promote microbial life. Another advantage, these grasses form a welcome mulch that also serves as a natural fertilizer. And if the hiker is surprised to see sheep between the vines, it is because they help maintain the estate and are the most efficient of mowers!

Then by the constant improvement of the processes around distillation and aging in barrels, in particular with detailed work on the wood. From experimentation to innovation, there is only one step, that of a research crowned by the patent filing on progesive infusion for his Gin Citadelle, certifying the rigour that Alexandre Gabriel knows how to demonstrate, as well as imagination (see article on the Gin Citadelle). Also, and on this he insists: in order to perpetuate this transmission of gestures, of which he is the ephemeral custodian. The idea of ​​a foundation to assemble this memory and preserve this knowledge « which is greater than us » is added to the long list of his ongoing projects.

Finally, of course, on ingredients, blending, recipe. Taste. “I am a creator of emotions, thanks to unique products. It is above all a gastronomic approach, by highlighting a dominant element, to reveal its taste quality imperceptibly. For gin, juniper can be enhanced with cinnamon or nutmeg.” Or by coriander, cardamom, angelica, cumin, almond, seeds of paradise, licorice, cubeb, savory, star anise, cassia, iris, violet, fennel, orange and lemon zest… The aromatic palette of Citadelle gin is structured around 19 flavours, carefully selected for their exceptional quality and combinatorial potential.

Crafted with the care of a goldsmith, Maison Ferrand’s high-end artisanal spirits appear today as models in their respective categories, all are stamped with the seal of the requirement with this rare ability to amaze, to move and give meaning to matter. Isn’t this the primary function of creation? It’s also very French! “We French people go to the end of things, we transcend the state of the art. We are geeks, somewhere. But everything we do must seem easy. That’s virtuosity. And it is together that we are the best, by confronting our knowledge in a transversal way. Not by staying in our corner. Americans say “Knowledge is power”. I say “Knowledge is pleasure”.  » So French Craft.

Citadelle Gin, savoir-faire & innovation

Plusieurs idées à la minute… Alexandre Gabriel est adepte du mouvement perpétuel ! Depuis 1996, Citadelle a ouvert la voie des gins artisanaux en France et représente une réussite exemplaire, jamais égalée. La marque le doit au savoir-faire de la maison mais aussi au temps qu’elle prend pour que les nouvelles idées éclosent et infusent.

L’infusion progressive, une technique brevetée

Au lieu d’une pratique courante qui consiste à infuser les aromates tous ensemble, chez Citadelle, on prend son temps, quitte à se compliquer la vie. Chacun des 19 aromates est traité séparément dans un alcool neutre de blé, pour la durée qui fait ressortir son caractère de manière la plus juste. Une précision digne d’une horloge suisse. Et pour obtenir une restitution olfactive et gustative la plus fidèle, à chacun son degré d’alcool d’infusion. Ainsi, la baie de genévrier nécessite un temps et un taux d’alcool plus important que l’anis étoilé. Au cours des 3 à 4 jours que dure ce processus, les aromates sont ajoutés successivement, pendant que le degré d’alcool diminue. Une innovation qui a fait l’objet d’un brevet, enregistré en 2018, le seul jamais octroyé sur la méthode d’infusion d’un gin. Ironie de l’histoire, il est français et non anglais !

Un travail de recherche unique sur les bois

Pour aller plus loin dans le champ des expérimentations, Citadelle a développé de nombreux essais sur les fûts. C’est d’abord intellectuellement passionnant et cela permet, pour ceux qui font l’objet d’un élevage sous bois de démultiplier les expressions aromatiques, grâce aux choix d’essences singulières. Ainsi, l’acacia a été retenu en priorité, pour son aptitude à donner un côté fleur blanche légèrement mentholé et beaucoup de rondeur au gin. Incroyable mûrier ! Il apporte une touche florale mais aussi un soupçon d’acidité bienvenu qui contribue à l’équilibre. Le châtaignier se trouve être le bois le plus structurant, grâce à ses élégants tanins. Les chênes français ayant contenu du Pineau des Charentes et surtout du Cognac ont un formidable pouvoir d’unification : ils ont le don d’arrondir les caractéristiques du gin. Enfin, le merisier n’est utilisé qu’en faible quantité, car il a tôt fait de prendre le dessus. Néanmoins, ses légères saveurs de noisette fraîches et de fruits rouges sont un vrai plus.

Au commencement, était l’œuf

12 ans après Citadelle Original, en 2008, Alexandre Gabriel remet au goût du jour le Golden Gin : on avait un peu oublié qu’à l’origine, le gin, ce grand voyageur, était transporté en fûts. Il fait un retour en force avec la Maison Ferrand, qui par-là, démontre une fois de plus son goût pour l’histoire et pour l’innovation. Citadelle « Réserve » aura demandé là encore, bon nombre d’expérimentations pour atteindre le résultat souhaité : de la puissance, de la complexité et beaucoup de finesse. Le savoir-faire de Cognac dans l’art du vieillissement donne toute sa mesure ici. Et pour multiplier les expressions aromatiques, on multiplie les types de bois ! Mûrier, merisier, châtaignier, acacia et chêne sont convoqués dans les chais du Château de Bonbonnet pour donner de la voix. Après un élevage de 5 mois dans ces différents fûts, l’assemblage est effectué dans un fût de chêne de 2000 litres, en forme d’œuf. Là encore, il est question d’innovation : la forme ovoïde permet une convection naturelle qui s’opère à l’intérieur, participant à l’harmonisation des différents distillats, pendant encore quelques mois. De plus, le bois permet une micro-oxygénation, aidant à l’intégration du bois tout en garantissant une exceptionnelle fraîcheur d’arômes. Et si Citadelle est le premier gin à disposer d’un brevet pour l’infusion de ses aromates, il est aussi le seul à utiliser ce processus de vieillissement. Le résultat ? Des notes intenses de genièvres et d’agrumes, admirablement fondues dans un ensemble riche et complexe. L’on pourrait multiplier les exemples qui expliquent qu’aujourd’hui Citadelle figure parmi les meilleurs gins du monde et soit couronné régulièrement par une pluie de récompenses. C’est un juste retour de sa créativité débordante dans la recherche de la meilleure définition d’une eau-de-vie : un gin élaboré par des puristes et des passionnés, pour tous les amoureux d’émotion.


Many ideas by the minute… Alexandre Gabriel is a fan of perpetual movement! Since 1996, Citadelle has paved the way for artisanal gins in France and represents an exemplary success, never equalled. The brand owes it to the know-how of the house but also to the time it takes for new ideas to blossom and infuse.

Progressive infusion, a patented technique

Instead of a common practice of infusing the spices all together, at Citadelle, one takes one’s time, even if it means complicating things. Each of the 19 flavors is treated separately in a wheat neutral alcohol, for the duration that brings out its character in the fairest way. A precision worthy of a Swiss clock. And to obtain an olfactory and gustatory restitution the most faithful, to each its degree of alcohol of infusion. For example, juniper berry requires more time and alcohol than star anise. During the 3 to 4 days that this process lasts, the aromatics are added successively, while the degree of alcohol decreases. An innovation that was the subject of a patent, registered in 2018, the only ever granted on the method of gin infusion. Ironically, it is French and not English!

Unique wood research work

To go further in the field of experiments, Citadelle has developed many tests on drums. It is initially intellectually exciting and allows, for those who are the subject of a breeding under wood, to multiply the aromatic expressions, thanks to the choices of singular essences. Thus, acacia was chosen as a priority, for its ability to give a slightly minty white flower side and a lot of roundness to gin. Incredible mulberry tree! It brings a floral touch but also a hint of welcome acidity that contributes to the balance. The chestnut tree is the most structural wood, thanks to its elegant tannins. The French oaks containing Pineau des Charentes and especially Cognac have a formidable unifying power: they have the gift of rounding the characteristics of gin. Finally, the birch tree is used only in small quantities, because it quickly takes over. Nevertheless, its light flavours of fresh hazelnut and red fruits are a real plus.

In the beginning, was the egg

12 years after Citadelle Original, in 2008, Alexandre Gabriel gives the Golden Gin a taste of the day: we had forgotten that originally gin was transported in barrels. It makes a strong comeback with Maison Ferrand, which again demonstrates its taste for history and innovation. Once more, Citadelle «Réserve» asked for many experiments to achieve the desired result: power, complexity and a lot of finesse. Cognac’s know-how in the art of aging gives its full measure here. And to multiply the aromatic expressions, types of wood are multiplied! Mulberry, cherry, chestnut, acacia and oak are summoned to the cellars of the Château de Bonbonnet to give voice. After 5 months of maturation in these different barrels, the assembly is done in a 2000 liter oak barrel, shaped like an egg. Here again, it is a question of innovation: the ovoid form allows a natural convection that takes place inside, participating in the harmonization of the different distillates, for a few more months. In addition, the wood allows a micro-generation, helping to integrate the wood while guaranteeing an exceptional freshness of aromas. And if Citadelle is the first gin to have a patent for the infusion of its aromatics, it is also the only one to use this aging process. The result? Intense notes of juniper and citrus, beautifully melted into a rich and complex whole. One could multiply the examples that explain that today Citadelle is among the best gins in the world and is regularly crowned with a rain of rewards. It is a fair return of his creativity overflowing in the search for the best definition of a eau-de-vie: a gin elaborated by purists and enthusiasts, for all lovers of emotion.

Les notes douces-amères de Nico de Soto, French bartender

Il possède des bars partout dans le monde, ou presque. Il influence, créé les tendances, cumule les récompenses. Dans ce milieu vibrionnant de la fête et du plaisir, Nico de Soto a pourtant creusé sa voie, étape par étape, patiemment, pour devenir un mixologiste de génie et un serial entrepreneur reconnu et respecté. Alors forcément, la sagesse s’entrechoque avec la jeunesse, et son franc-parler se savoure par gorgées. En voici 3 bien relevées.

FCG. Comment se définit la French Touch dans votre métier ?

NdS. A l’étranger, on a cette image de qualité, de bons vivants. C’est sur cette étiquette que j’ai été embauché facilement à New-York à mes débuts. La France, c’est la classe, la mode, l’art. Comme les Italiens, d’ailleurs. Maintenant, on nous voit aussi comme des « jamais contents », et je dois dire que je suis assez d’accord. Mais ce qui me chagrine le plus, c’est que malgré les très bons bars à Paris qui proposent des cocktails hyper créatifs et de haut niveau, il y a un manque de curiosité des français. La clientèle est surtout étrangère. Hier j’étais à une terrasse de café et j’entendais encore « Je voudrais un rouge. » Un rouge ! Est-ce qu’on va au restaurant pour dire « Donnez-moi à manger » ? Il y a un déficit de culture sur les cocktails alors qu’il y a de vraies propositions novatrices, inédites. Les palais ne sont pas entrainés. Il n’y a pas assez d’intérêt sur ce sujet alors qu’en Asie, il y a la queue dès qu’un nouveau spot ouvre et bouscule un peu les codes.

FCG. L’innovation, c’est un terme pertinent pour vous ?

NdS. Bien sûr ! On ne fait que ça, en permanence. Il y a toujours de la recherche, de nouveaux ingrédients, des nouvelles techniques. On ne fait jamais le tour. D’ailleurs, les pairings* les plus intéressants sont ceux où il n’y a pas que du vin… le cocktail offre des options vraiment intéressantes pour surprendre et renouveler la gastronomie. Même si on vit dans un monde où la nouveauté est devenue la norme et que plus rien n’émerge vraiment dans le foisonnement d’informations…

FCG. Est-ce que la vague du « Craft » dans votre secteur est un retour aux sources alors ? En réponse à cette course effrénée à la nouveauté ?

NdS. Attention, il y a Craft et craft. Le retour à l’« authentique » avec la réédition de recettes d’avant où les alcools étaient de mauvaise qualité et que les dosages servaient à masquer le goût, ça n’a pas de sens. Des années de recherche, de science et de bon Craft ont quand même largement amélioré les choses ! Le petit batch** fait soi-même, en tout cas qui n’est pas industriel, aura toujours mon attention. Il faut regarder les produits qui vont bien vieillir. Je guette de très bons whiskys bretons qui ont été fait avec patience, avec le temps nécessaire, et qui sont juste dingues. Les gens qui font ça, ils m’intéressent. Pour moi, le Craft, c’est faire les choses bien et ne pas tomber dans la facilité.

*pairing : accord met-boisson
** batch : lot, cuvée


The bittersweet notes of Nico de Soto, French bartender.

He owns bars all over the world, or almost. He influences, creates trends, accumulates rewards. In this vibrant environment of party and fun, Nico de Soto has yet dug his way, step by step, patiently, to become a genius mixologist and a recognized and respected serial entrepreneur. So, of course, wisdom clashes with youth, and its frankness is enjoyed by sips. Here are 3 of them.

FCG. How is French Touch defined in your profession?

NdS. Abroad, we have this image of quality, good living. It is on this label that I was easily hired in New York at my beginnings. France is synonymous of class, fashion, art. Like the Italians, by the way. Now we are also seen as “never happy”, and I must say that I agree with that. But what bothers me the most is that despite the very good bars in Paris that offer super creative and high-level cocktails, there is a lack of curiosity of the French. The clientele is mostly foreign. Yesterday I was at a cafe terrace and I still heard ‘I would like a red wine. » A red wine! Do we go to a restaurant and say, “Give me something to eat”? There is a culture deficit on cocktails when there are real innovative proposals. Palates are not trained. There is not enough interest on this subject while in Asia, there is the queue as soon as a new spot opens and shakes the codes a little.

FCG. Is innovation a relevant term for you?

NdS. Of course! We do that all the time. There is always research, new ingredients, new techniques. You never go around. Moreover, the most interesting pairings are those where there is not only wine… the cocktail offers really interesting options to surprise and renew the gastronomy. Even if we live in a world where novelty has become the norm and nothing really emerges in the abundance of information…

FCG. Is the wave of ‘Craft » in your sector a return to the roots then? In response to this frantic race to novelty?

NdS. Careful, there’s craft and Craft. The return to “authentic” with the re-edition of previous recipes where the alcohol was of poor quality and that the dosages were used to mask the taste, it makes no sense. Years of research, science and good Craft have still vastly improved things! The small homemade batch, in any case a batch that is not industrial, will always get my attention. We have to look at products that will age well. Right now, I’m waiting for very good Breton whiskies that have been made with patience, with the necessary time, and that are just crazy. I’m interested in the people who do that. For me, Craft is doing things right and not take the easy way.